But my Stockholm syndrome is in your room

La livraison a été faite dans l’après-midi, mais personne n’a semble-t-il, encore eu le temps de tout ranger. Comme très souvent, Rory arrive en avance, il prévient donc ses collègues, qu’il va en profiter pour tout ranger en réserve. Il leur dit aussi qu’il va essayer de tout finir de ranger, d’en profiter qu’il n’y a pas encore trop de monde, mais qu’ils ne doivent pas hésiter à l’appeler s’ils ont besoin de lui. Et sur ces dernières paroles, le barman prend l’ascenseur qui permet de rejoindre le bar au deuxième étage où se trouve les réserves. Muni d’un cutter, il commence à dépoter les cartons, majoritairement de boissons et à les ranger sur les différentes étagères, en prenant bien soin de respecter les dates et donc de mettre les plus récentes au fond. Rory, il est plutôt du genre employé consciencieux. Il a toujours été comme ça. Toujours à vouloir faire plaisir et se mettre en quatre pour les autres. De plus, même s’il n’est pas très fan des extras qu’il a à faire parfois, il tient à cet emploi, qui lui permet enfin d’avoir un vrai logement à lui. Bon, c’est pas du grand luxe, mais après avoir été SDF pendant tant d’années, il se sent particulièrement redevable envers Zach et fait tout pour que tout se passe au mieux au niveau du travail. Ne voulant pas perdre tout ce qu’il a réussi à avoir depuis deux ans.

Rory ne voit pas le temps passer et la soirée est déjà bien entamée quand il termine enfin le dernier carton. Le jeune homme suppose que la soirée est calme pour le moment, puisqu’aucun de ses collègues, ni son patron, ne sont venus le chercher en renfort, c’est qu’ils gèrent probablement bien sans lui et donc qu’il n’y a pas foule, ce qui n’est pas plus mal. Rory aime bien les soirées calmes, ça repose un peu. Même si quand ça bouge pas mal, c’est bien aussi, il voit moins les heures passer. Mais plus il y a de monde, plus les chances sont grandes qu’il ait à aller au troisième…

Il essaie de ne pas y penser et descend simplement avec ses cartons cassés et pliés sous le bras, les mettre dehors à la benne, avant de se laver les mains puis prendre place derrière le bar du casino. Il prend les informations auprès d’une collègue et comme il le pensait, c’est assez calme pour le moment. Rory sert des clients, nettoie les verres, puis fini par poser les yeux sur une silhouette assise plus loin dans la salle. Son cœur rate un battement. Tout à coup, il se sent très mal. Il reconnaitrait ce jeune homme entre mille. Impossible de l’oublier, même si ce n’est pas pour de bonnes raisons. « Qu’est-ce qu’il fiche là lui ? » Rory marmonne, écoeuré, en colère et paniqué aussi. D’autant plus paniqué que ce dernier vient de se lever et se dirige dans sa direction. Le barman essaie de reprendre consistance et de ne rien lui montrer de son trouble, en se comportant le plus professionnellement possible. « Bonsoir. Qu’est-ce que je vous sers ? » Rory évite soigneusement, cependant, de croiser le regard du bouclé.

C’est juste horrible pour Rory de voir le bouclé, assis là. Même au boulot, il ne peut plus être tranquille. Bien sûr qu’il savait déjà que le brun connaissait son lieu de travail, il ne pensait cependant pas que ce dernier en avait l’accès, vu la somme a débourser pour avoir le droit d’accès à cette partie du Nexxt. Mais après tout, si le père du jeune homme a les moyens de le faire, pourquoi il en aurait été différent du fils ? Et vu comment ce dernier semble en vouloir au barman, il n’est finalement pas très étonnant, qu’après s’être invité chez lui, il s’incruste aussi ici. Et pour couronner le tout, il s’avance vers le bar. Rory essaye de ne pas montrer quelconque réaction et agi le plus professionnellement possible. Peine perdue, l’autre sait parfaitement comment le perturber plus que de raison. Après ce qu’il lui a fait subir chez lui, c’est pas bien compliqué. Rory le craint tout simplement. « Je.. je suis barman avant tout. » Le jeune homme fébrile bafouille un peu, essayant de se justifier, même si c’est peine perdue face à Benjamin, qui le déstabilise bien trop. Il ne le comprend pas, il n’arrive pas à le cerner. C’est con, parce que s’il n’était pas si désagréable, il pourrait tellement lui plaire. Il n’a pas l’air d’avoir un si mauvais fond, de ce qu’il se souvient de leur échange chez lui et en plus, il est carrément pas mal, clairement plus que son père, c’est indéniable. Mais le barman ne peut s’empêcher aussi de se souvenir qu’il était à la limite de le violer, qu’il lui a fait mal volontairement et c’est précisément ce souvenir qui prédomine dans son esprit, alors qu’il lui sert, toujours sans le regarder, son whisky. Rory sursaute légèrement, à la manière du bouclé de lui attraper le poignet, et frissonne, non pas de plaisir, mais d’effroi, à ses mots. Il regarde autour de lui, comme cherchant de l’aide auprès de ses collègues, mais aucun ne semble avoir capté la scène. Le barman craint de se retrouver seul avec lui et pourtant, il ne va pas avoir le choix. Etant sur son lieu de travail, il ne peut se permettre de refuser, c’est un client et Zach n’acceptera jamais que Rory dise non. Il ne comprendrait probablement pas non plus, Rory n’a jamais dit non. « Allons-y tout de suite alors. » Non, il n’est pas pressé de passer ce moment avec lui, mais plus vite c’est fait, plus vite il s’en ira, plus vite il retrouvera sa tranquillité, même si ce n’est que temporaire. Il n’a pas envie de subir les jeux pervers de Benjamin plus que nécessaire. Moins il repousse le moment de monter, plus vite il sera soulagé. Enfin c’est ce qu’il espère.